Alors que la mort vient le cueillir, Léonard est envahi d’un flux d’images de sa vie. Il va mourir seul à cause de ses excès de femmes, d’alcools et de provocations. Désormais mort, il refait le film en sachant tout ce qui va faire sa vie d’homme, déceptions et frustrations qui engendreront de la violence. Zoe, 10 ans, doit composer avec le mutisme soudain de sa mère internée. Persuadée que celle-ci a vu quelque chose qui a provoqué son apathie, elle fouille dans ses affaires et découvre un coffre. Tandis que Leonard affronte le spectacle de sa vie, impuissant à rien y changer, Zoe fouille le passé de sa mère. Entre les deux personnages principaux, le récit progresse tel une toile d’araignée jusqu’à dénouer les fils. Toujours aussi bouleversant, l’auteur poursuit sa quête d’humanité en chacun, sans concession sur la lâcheté, la dureté, les paradoxes et les grands travers qui ruinent des existences et causent des dommages collatéraux. Entre noirceur et lumière, réel et imaginaire, ombre et soleil, Léonard et Zoe entrent en collision jusqu’à la révélation finale.

Un écrivain, installé en Brière, en panne d’inspiration depuis la publication il y a 3 ans de son dernier roman, accepte une proposition singulière : rédiger la notice d’Alphonse de Chateaubriant, dans un ouvrage collectif célébrant les Grands Prix de l’Académie Française. Acculé, il se lance à corps perdu dans ce travail qui va le mener à des aventures rocambolesques et à des rencontres improbables : un sanglier qui vole un livre, un moustique qui lit le manuscrit sur l’écran de l’ordinateur, une battue aux sangliers qui dérape, une course poursuite digne d’un film des frères Cohen. Le roman progresse sous la forme d’une autofiction déguisée : de quiproquos en quiproquos, l’écrivain va s’identifier à l’objet de son étude, se travestissant en gentilhomme campagnard et volubile. D’un ton burlesque, rempli d’auto-dérision et suffisamment enlevé, l’auteur nous embarque dans les aventures cauchemardesques de cet anti-héros sauvage et asocial.

Claire est enseignante dans un établissement spécialisé pour enfants fragiles et déficient mentaux. Elle expérimente des innovations pédagogiques dans un climat de bienveillance, de douceur et de positivité. En appréciant la différence de ses élèves et en les accompagnant dans leur apprentissage de l’autonomie dans une société qui les exclut trop facilement, elle peut mesurer leurs progrès, encouragée par leurs parents. Gabriel est un nouvel élève, très introverti, avec lequel s’installe une relation lumineuse jusqu’à ce qu’elle soit suspectée de gestes inappropriés. S’ensuit une longue descente aux enfers contre laquelle elle lutte, accusée par les parents, lâchée par son institution et souillée par la suspicion générale, même si elle peut compter sur le soutien de sa famille. L’auteur s’attache à décrire le long processus de culpabilité, de doute de soi-même, de honte, de désarroi et de lutte tant physique que mentale pour dénouer le nœud inextricable d’une accusation en apparence sans faille. Cette histoire dérangeante nous transporte tel un funambule sur un fil qui menace de se rompre sous la pression du fanatisme judiciaire et puritain. Un véritable tour de force et une plume singulière !

Dans ce roman choral lumineux, un bébé, prénommé Eve, est au cœur d’une constellation familiale et relationnelle dont chaque membre, principalement féminin, exprime son ressenti alors que se prépare son baptême laïc. Des femmes de différentes générations, aux divers parcours de vie, de métier et de sexualité, livrent sans concession leurs états d’âme qui se répondent. Sans oublier un homme, ami de la mère de Eve et père intime de cet enfant, sans qui son arrivée n’aurait pas été possible. L’auteure, privilégiant le prisme du corps qui porte chaque femme, fait entendre une nouvelle voix dans la littérature de sensibilité féminine, aux prises avec l’évolution des mœurs et de la société plaçant la femme au centre de nombreux enjeux, dans ses rapports aux hommes, au travail et aux relations intra et extra familiales et conjugales. Une écriture pleine et douce pour célébrer un kaleidoscope de féminins au pluriel, avec bienveillance !

C’est l’histoire d’une fratrie de quatre soeurs, sur l’île d’Iazaa en Italie, qui cache une mystérieuse disparition de la cadette : Mimi, un soir de Carnaval a suivi son aînée, Aida. Cette disparition provoque une cassure au sein de la famille qui se traduit par l’exil d’Aida à l’âge de 17 ans, par le silence, l’indifférence, la souffrance et la violence chez le père et la résignation chez la mère et les deux sœurs aînées. Lorsque 20 ans après, Aïda revient sur l’île pour l’enterrement du père, elle découvre quelles adultes ses sœurs sont devenues. La parole va se libérer et faire voler en éclats les apparences et surgir des questions qui vont rebattre les cartes de leurs existences. L’auteure a un véritable sens du récit où tout se révèle par touches subtiles, dans une dramaturgie maîtrisée dans les moindres détails. Sans mélodrame ni pathos, elle nous plonge dans une famille en déperdition dans un environnement insulaire à la limite du suffocant. Une très belle réussite dans une langue solaire et rageuse à la fois !