Montherlant, bourreau de soi-même

Voici le premier ouvrage consacré à ce fait important de la littérature française : le théâtre de Montherlant. Michel de Saint-Pierre s'était signalé d'abord par ses Contes pour les sceptiques. Puis l'auteur de Ce monde ancien avait su par un seul roman imposer son nom avec éclat. Montherlant, bourreau de soi-même révèle en lui l'essayiste et le
critique. On remarquera surtout dans ce livre les études consacrées aux deux pièces les plus discutées de Montherlant : Fils de personne et Demain il fera jour. Rarement des œuvres littéraires ont été disséquées avec un instrument plus précis et plus aigu. Michel de Saint-Pierre montre en leur protagoniste, Georges Carroou, «le personnage le mieux observé, le plus vrai, le plus Iimportant et le plus complet dans sa vérité, auquel Montherlant ait jamais donné le jour». Et il agrandit Ia portée de ce personnage, dans lequel il voit le représentant d'une classe sociale française déterminée, à une certaine époque de l'histoire de la France. Michel de Saint-Pierre est cousin de Montherlant. Mais il semble que ce fait, loin de le pousser à écrire une apologie, l'ait porté au contraire à la sévérité. Par ailleurs, il lui a permis de faire état de lettres d'Henry de Montherlant, de conversations avec lui, etc. Nombre de pages - celles, par exemple, où il rapporte comment et pourquoi l'auteur de Demain il fera jour, en faisant jouer cette pièce, a recherché volontairement un échec, ont une saveur de confidence
personnelle qui ajoute un intérêt anecdotique à la valeur proprement critique de Montherlant, bourreau de soi-même. Cet ouvrage fait désormais corps avec l'œuvre théâtrale de Montherlant, dont il ne peut être séparé.