Houris

Kamel Daoud

Gallimard

  • Conseillé par (Libraire)
    18 septembre 2024

    Quelle force, quelle puissance, quelle beauté portée par ce texte!!
    Ces derniers jours, il m'imposait une écoute, une attention, un rythme, un souffle, une respiration , je ne pouvais faire autrement que de l'apprivoiser. Le laisser pour la nuit et attendre avec hâte de le retrouver le lendemain soir.

    Vous souvenez-vous de ce que vous faisiez la veille de l'an 2000? En train comme moi peut-être de préparer une fête ou de vous moquer du fameux "bogue de l'an 2000" qui annonçait la fin d'un monde ...

    Au même moment, 1000 êtres furent assassinés en Algérie par les fous de Dieu...Ce fut quasiment l’acmé de la décennie noire et ses centaines de milliers de victimes. Dans son roman, Kamel Daoud donne voix à une rescapée du massacre, une petite fille de 5 ans laissée pour morte égorgée, sauvée, muette, et dont la langue intérieure se déploie inexorablement au fil du roman, racontant les silences qui effacent, annihilent, l'Histoire et les âmes. Racontant la violence de l'oblitération de la mémoire pour raison d'État et de réconciliation nationale, racontant la violence du silence imposé aux femmes, évoquant l'amour de l'auteur pour son pays aussi... Racontant la honte, la survie, l'injustice, la lutte contre l'oubli, la beauté et la monstruosité, la résistance et l'espoir.

    Langue intérieure et langue du monde se cherchent, se répondent, se heurtent ,se déchirent...le temps d'un long monologue que la survivante, rebaptisée Aube, entame avec l'enfant en elle qu'elle ne veut pas voir vivre car vivre serait mourir.
    Un superbe portait de femme(s).
    Une parole essentielle.
    Un très très très beau livre, vraiment.

    Vanessa, Charlemagne Toulon


  • Conseillé par
    2 septembre 2024

    Avec le pouvoir de ses mots et la force littéraire de son « Houris », Kamel Daoud s’engage pour une femme libre. Houris prône la reconnaissance des responsabilités des terroristes pendant la guerre civile et invoque la puissance de la littérature pour reconnaître la souffrance de leurs victimes, si la société ne le fait pas.
    Incontournable !
    Chronique entière et illustrée ici
    https://vagabondageautourdesoi.com/2024/09/01/kamel-daoud-houris-rl2024/


  • Conseillé par
    2 septembre 2024

    Taïmoucha

    De 1990 à 2018.
    Ce récit s’ouvre sur un poignant monologue intérieur d’Aube, une jeune femme marquée à jamais par la guerre civile en Algérie. A l’âge de 5 ans, elle a été mutilée et rendue muette lors d’un conflit sanglant opposant extrémistes et militaires, qui dura une décennie. Elle s’adresse à son enfant, lui confiant le fardeau d’une écrasante culpabilité liée à la mort de sa sœur parmi le millier de cadavres laissés par cette guerre. Aube revit sans cesse cette scène tragique.
    D’une intensité bouleversante, ces trois récits de victimes sur trois décennies, sont les témoignages déchirants des victimes, seuls vestiges de la violence qui a décimé des familles entières. C’est l’histoire de vies brisées luttant inlassablement pour continuer à vivre malgré des traumatismes indélébiles. C’est aussi le récit d’une condition féminine qui cherche désespérément à prendre la parole dans un monde qui les méprise.
    Une ode poignante à ceux qui ont tout perdu, frôlé la mort avant de sombrer dans l’oubli, recouverts d’un voile de silence. Un hommage magnifique à l’amour inébranlable d’une fratrie.
    L’écriture, poétique, précise et remarquable se mérite….
    « Les égorgeurs sont repartis avant l’aube alors que l’on grelottait, mortes ou vives, ma sœur et moi, chacune les paupières fermées sur sa vie »

    « Je me suis trompée des milliers de fois en revivant cette scène et en l’altérant sans m’en rendre compte. Car j’avais tué le temps en moi, son écoulement »

    « Ma fille, je ne pleure pas…. J’ai fermé les yeux et depuis je suis aveugle à l’éclat du monde. »

    « … Je suis son fleuve de vin, de lait et de miel ; son cheval de fatigue … sa peau transparente, sa chevelure rousse qui plonge dans le domaine des dieux. Rien n’atteint aussi profondément mon corps vivant. »